Paperasses : état des lieux
Nous avons récupéré sans peine notre nouveau carnet de passage en douane pour le véhicule au consulat de Suisse et nous avons effectué la demande de renouvellement de passeport pour les enfants. Le cordial « Grüzi » que nous ont offert les employés de l’ambassade nous a renvoyé en un quart de seconde à notre chère Suisse, merveilleusement mise en valeur par les images des alpes enneigées qui décorent les murs du consulat. Nous aimerions ici souligner l’excellent accueil que nous recevons dans les ambassades suisses et la disponibilité de son personnel.
 
Suite du voyage
Avant d’arriver en Inde, nous avions quelques appréhension pour l’après Inde. Par où quitter le pays ? Où aller ? A l’Ouest, le Pakistan et l’Iran semblent inhospitalier en ce moment et ne nous conduisent pas dans la bonne direction. A l’Est, la Birmanie n’autorise pas le passage par voie terrestre. Au Nord, la Chine semble inaccessible en véhicule. Restait à envisager un nouveau shipping, perspective guère réjouissante ! Quelques contacts plus tard, les choses ont changé. Il semblerait que la traversée par la Chine ne soit pas si difficile que cela et probablement pas plus chère qu’un shipping. De plus, la famille belge d’Angaleo pourrait se joindre à nous pour cette traversée… Nous voilà donc avec de nouvelles perspectives intéressantes et réjouissantes. Nous poursuivons donc nos démarches dans ce sens. A suivre…
 
2ème Partie. Mumbai.
 
Nous l’avions fait remarquer lors de notre dernière mise à jour, les mises en gardes reçues avant de venir en Inde étaient nombreuses. En schématisant, il y avait deux grands courants de pensées :
a.    c’est effroyable, la saleté, la misère, la puanteur. Vous serez choqués, c’est sûr !
b.    c’est phénoménal, l’énergie, l’ambiance, le style de vie, la spiritualité. Vous serez envoûtés, c’est sûr !
 
Au final, nous évoluons entre ces deux mouvements, naturellement et sans grand choc ! La ville de Mumbai se laisse apprivoiser aisément et offre plusieurs petites merveilles. Nous avons par exemple apprécié nous promener dans les jardins suspendus, qui offrent une vue magnifique sur la ville et la baie ouest. Nos pas nous ont ensuite conduit le long de Malabar Hill, où se trouvent les maisons plus luxueuses et les familles plus aisées. Au milieu de ce quartier, se cache une sorte de petit village de tôles ondulées et de constructions misérables. Les plus pauvres y vivent, autour d’un grand bassin sacré dans lequel nagent quelques tortues et poissons, que cannes et pigeons regardent avec indifférence.
 
Le mois de septembre, comme probablement ceux qui le précèdent et le suivent, est le mois des fêtes. Nous avons donc pu assister à divers cortèges, bals et autres cérémonies religieuses dans les temples, rythmés par le son des cloches vigoureusement secouées pendant des heures. Nous avons beaucoup ri en découvrant au coin d’une rue, une statue de divinité pudiquement dissimulée derrière un sari, pendant que les habitants du quartier s’affairaient à la vêtir. Une fois le travail achevé et le voile levé, nous avons découvert la statue magnifiquement parée et vêtue. Nous imaginions à quoi pourraient ressembler nos églises, si nous offrions à Jésus pareille attention et bienveillance…
 
Quant aux bals, nous avons contemplé longuement les chorégraphies improvisées mais apparemment rôdées des hommes et femmes somptueusement habillés, dansant au rythme des percussions et au sons des voix, souvent criardes. Les étoffes des saris et des tuniques se mélangent et se croisent, formant une sorte de kaléidoscope humain. Féerique.
 

Nous avons assisté également à une merveille logistique : la distribution de 200'00 repas chauds, qui se déroule chaque jour à 11h30 précises devant la gare . Les repas sont collectés dans les familles et acheminés sur les places de travail, pour permettre à chacun de manger sainement et en accord avec sa religion. Tout cela se passe dans le calme et la sérénité. Impressionnant.
 
Le quartier de Colaba, où se trouve notre hôtel, nous a, quant à lui, offert son lot de rencontres familières, de repères et de bonnes affaires. Nous avons assisté un jour au tournage d’un clip video sur le boulevard qui longe la mer. Au milieu de la circulation et dans un bruit de klaxon étourdissant, la cacophonie était magistrale. Ici, la chorégraphie semblait avoir été inventée à la dernière minutes et les quelque trente danseuses couvertes de brillants et de mille couleurs peinaient à assimiler les enchaînements.
 
Non loin de l’hôtel, nous avons déniché un petit paradis. Theobroma. Une chocolaterie - pâtisserie ! Nous nous sommes régalés, à plusieurs reprises, de brownies, de tranches de gâteaux ou de mousseux au chocolat ou au citron plus succulents les uns que les autres. Opium, Lemon Mountain, Chocolate Mousse Cake… A six, nous prenions six tranches différentes et dégustions 2 cuillères de chaque nouvelle trouvaille. C’est fou soudain comme le temps passe vite en attendant Casita dans ce type d’endroit !
Anniversaire de Sam
Le Theobroma fut l’endroit rêvé pour offrir à Sam un gâteau d’anniversaire hors catégorie. Nous n’avions en revanche pas encore récupéré Casita, dans laquelle  se cachaient les cadeaux… Tant mieux ! Cela nous a permis de fêter une  seconde fois les neuf ans de Sam autour de tranches de Brownies et autres friandises judicieusement sélectionnées…
 
Jours fériés : quand 3 jours deviennent 10 jours…
Si les jours fériés sont synonymes de fêtes et de réjouissance, ils deviennent un véritable calvaire lorsqu’on souhaite faire avancer un processus administratif, déjà lent en temps normal. Trois jours ont été nécessaires pour récupérer Casita. Mais ces trois jours se sont étalés sur dix jours, en raison des week-ends et autres festivités.
 
Hôtel Prosser’s : notre résidence secondaire
Nous avons séjourné et patienté à l’hôtel Prosser’s. Relevons tout de suite la gentillesse du personnel et sa disponibilité. Mentionnons le charisme et le courage de ce népalais qui y travaille douze mois consécutifs avant de s’accorder 2 mois de vacances auprès de sa famille au Népal, où il retrouve sa femme et ses deux enfants de 6 et 9 ans. Remarquons la relative propreté des sanitaires communs. Rappelons-nous enfin, des piqûres, par dizaines, puis par centaines, dont nos bras, jambes, cous, fesses, pieds, mains, doigts et nuques ont été les victimes chaque nuit, dès la deuxième semaine. Enfouis jusqu’au crâne dans nos sacs de couchage, parfois même la tête recouverte d’un capuchon pour les porteurs d’un sang particulièrement succulent pour la vermine, nous avons lutté contre un ennemi invisible. Jamais, nous n’avons trouvé la source de ces piqûres. Puces ? Araignées ? Moustiques ou  mouches silencieuses ? Tout ce que nous savons, c’est que ça nous a gratté… Et Casita, nous a beaucoup manqué !!
 
 
Récupération de Casita : tout est dans le rythme…
Vous vous souvenez du rythme soutenu de nos dernières journées en Afrique du Sud ? Voici celui adopté en Inde :
 
Samedi 26 septembre : le container est déchargé. La douane est fermée pour le week-end.
Dimanche 27 : Douane fermée pour le week-end on a dit !
Lundi 28 : Douane fermée. C’est férié.
 
Mardi 29 : 14h. SMS. « Demain rendez-vous à la douane pour l’examination du chargement »
Mercredi 30 : « Bon anniversaire Sam. A tout à l’heure ». 9h30, Loane et Thierry quittent l’hôtel, escorté par un charmant hindou qui parle hindi, direction l’embarcadère des navettes qui traversent la baie de Mumbai. A priori l’idée est bonne, puisque la mer est bien moins encombrée que la route… Mais la dernière navette a quitté l’embarcadère à 9h30 ! Direction, le bus, puis le taxi, pour  attraper une autre navette qui quitte Mumbai un peu plus haut dans la ville. Départ à 11h. Arrivée à 12h30. 30 minutes de palabres pour obtenir l’autorisation de transiter par le port marchand (cette navette nous a en effet déposé là où nous n’avions pas le droit d’aller…). Re-Bus, puis rickshaw (taxi à trois roues mieux connus sous le nom de Tuk-Tuk). Arrivée au bureau à 13h. Le bureau est vide. On s’installe. 14h. Le bureau est vide. 15 h. Le bureau est vide. Nos estomacs aussi. 16h. Le bureau est vide. La pile de journaux aussi. 17 h. Le bureau est vide. « A quelle heure ça ferme ? »
-    Normalement 18h.
17h30. Le bureau est vide. Le regard de Loane aussi.
17h56. Tiens, voilà quelqu’un ! Notre agent présente notre carnet de passage en douane et le passeport de Thierry. Puis, souriant et satisfait annonce que tout est ok. Devant le regard interrogatif (voir agressif) de Thierry, il précise : « demain, nous pourrons faire l’inspection, les papiers ont été accepté. Mais il faudra venir tôt. Il n’y a qu’un seul officier des douanes et il est un peu surchargé ». Ca, on l’avait remarqué !
22h30 : Bon anniversaire Sam… Sam est très déçu de ne pas nous avoir eu à ses côtés le jour de son anniversaire. Nous avons fait de notre mieux pourtant...
 
Jeudi 1er octobre : Thierry et Loane quittent l’hôtel à 9h, pour prendre la navette de 9h30 cette fois. Arrivée au bureau des douanes à 10h15. 11h. Personne. 12h. Personne. 13h. Si on allait manger ? 13h15. Repas terminé et personne dans le bureau. Transfert au dépôt des containers. 14h. Déjà 45 minutes que nous sommes là, mais personne pour examiner notre container. 15h. Personne. 15h30. On peut aller au container. Génial ! Ca veut dire au moins que notre container est là. 15h35. Il est où exactement ?! Nous sommes dans un immense dépôt où les containers sont empilés en attendant que l’officier des douanes procède à son inspection. 15h45. On est au bout du dépôt, non ? 15h50. Il faut faire demi-tour, on a du le rater. 16h. Il fait les inspections jusqu’à quelle heure l’officier ? 16h05. Là ! Derrière la pile, c’est le toit de Casita. On casse le scellé. On entre dans le container. La fenêtre arrière est fermée. Thierry fait le tour par l’extérieur. Toutes les fenêtres sont intactes et fermées. Il n’y a eu aucune effraction. 16h10. Vous n’avez pas du dégrippant ?! J’arrive pas à ouvrir le cadenas… 16h20. Il faut scier le cadenas. 16h30. Voilà une lame de scie. On se passera de la scie. 16h45. Heureusement que l’officier est lent… 16h55. Il viendra, vous êtes sûrs ? 17h00. Loane entre dans Casita par le fenêtre de côté et va ouvrir la fenêtre arrière pour Thierry. 17h02. Coucou ! Ca pue le poisson, là-dedans ! On regardera ça après, pour le moment, il faut ouvrir le capot, l’officier ne devrait plus tarder. Il veut voir le numéro de châssis et de moteur.17h20. Personne. Casita, la bouche bée, attend l’inspection douanière. 17h30. Personne. 17h50. Personne. 17h56. Il viendra votre officier des douanes ? 18h10. Notre agent arrive. Seul. Il faut prendre une photo de la plaque dans le capot, avec les numéros de châssis et de moteur. L’officier s’en contentera. 18h11. Les photos sont prises. L’inspection est terminée. J’hallucine…
Deux jours, pour  une photo avec un téléphone jetable ! Pour le coup, je vais en faire une dans mon téléphone et la garderai précieusement pour les prochaines fois… On ne sait jamais !
18h05. On ferme le capot. Thierry sort par l’arrière. « C’est quoi cette odeur ? C’est infecte ! » Loane ferme la fenêtre arrière et ressort par celle du haut. Nous n’avons plus de cadenas… Tant pis, on referme avec les bâches, demain de toutes façons on pourra sortir de là… Comment ça non ? Encore un jour férié ?
 
Vendredi 2 octobre : Anniversaire de Gandhi. Douane fermée. Il y a des jours où je déteste tout le monde, même les hommes les plus illustres et non violents… Heureusement la ville reste gaie et colorée...
 
Samedi 3 octobre : Ben, c’est le week-end. Il pleut des cordes. Espérons que celles qui tiennent la bâche résistent… Puis, le soleil brille sur la vill et les saris...
 
Dimanche 4 octobre : C’est le week-end, on vous dit ! Alors on a profité de se ballader, de prendre des photos et de se faire prendre en photo.
 
Lundi 5 octobre : 14h. Départ pour la gare pour Loane et Thierry. Il pleut, les navettes ne naviguent pas. Au programme, récupérer Casita ! 15h. « Les trains Indiens sont toujours à l’heure. Le nôtre partira à 15h15 » C’est malin de dire ça à un Suisse ! Notre escorteur est très fier. 15h40. Le quai est plein. Les voies sont vides. 15h48. Le train est plein. Le quai, l’est encore… 15h51. Premier arrêt. (Pour alléger le récit, nous nous contenterons de préciser les heures d’arrêt du train…) 15h54. 15h57. 16h04. 16h06. 16h21. 16h23. 16h25. 16h29. 16h36. 16h40. 16h45. 16h52. 16h54. 17h10 (ouah !) 17h23. Terminus ! 17h23 !! Et maintenant, comment on fait pour sortir Casita à l’heure ? « Le dépôt travaille toute la nuit, pas de soucis… » 17h30 : premier taxi. 18h20. Notre agent nous attend à la sortie du taxi pour nous emmener au dépôt. 18h35. Nouveauté. On a une piscine sur le toit de Casita ! 18h50, les bâches sont enlevées. 19h15. Thierry est détrempé. Il vient de ramper sous le véhicule pour le détacher. Il pleut des seaux d’eau. 19h20. On commence la manœuvre pour sortir du container.19h30. Casita est LIBRE !!!! Elle pue le poisson, mais elle roule. Coup de téléphone à Véro pour la rassurer. 20h30. On attend l’autorisation de sortir du dépôt. 21h30. On attend toujours l’autorisation de sortir du dépôt. 22h. Il faut remettre les bâches nous-mêmes sur le container. 22h30. Il faut payer un supplément pour les machines louées pour élargir la sortie du container. 23h. Les négociations se poursuivent. 23h40. Ca y est. On est dehors. Il reste à regonfler les pneus, faire le plein. 2h45. Pffffffft. N ! Je viens de crever un pneu. 2h46. Je parque devant l’hôtel. Pour le pneu crevé, on verra demain. Ou plutôt, tout à l’heure !
Casita : état des lieux.
Une malle alu de la gallerie a été arrachée, ce qui a cassé une partie de la gallerie. La porte de la cellule ne s’ouvre pas : grippée. Idem pour tous les cadenas. Le pneu arrière est détruit. Il faut en acheter un neuf. L’odeur de poisson est persistante…
Tout le monde se met au travail. Thierry sur la gallerie, pour réinstaller les panneaux solaires, réparer les dégâts et attacher le matériel, puis à l’intérieur, pour installer 4 ventilateurs. Véro s’occupe de défaire les sacs, ranger les vêtements, retrouver les affaires bien cachées et donner un petit coup de ménage avec l’aide des enfants. Un cri. « THIERRY ! Je peux pas… »  Véro vient d’ouvrir le frigo avec l’intention d’y passer un coup de patte. Nous avions laissé des œufs dans le frigo( maintenu ouvert pour éviter les odeurs), dans des boîtes en plastique, bien étanches. Les œufs, ça se garde, avait-on pensé… Il y avait des vers dans tout le frigo. Ca grouillait de partout. Ca sortait des boîtes en plastiques. Les oeufs étaient décomposés et liquides. Quant à l’odeur de poisson, elle venait de révéler sa source… Véro, debout dehors, encore tremblante : «  si ça ne tenait qu’à moi, je prendrais le frigo et le jetterais tel quel ! »
 
Premiers jours à la maison : quel pied !
Nous avons immédiatement eu du plaisir à dormir dans nos lits douillets et dans nos draps sans vermine. Nous sommes très surpris par l’attitude des gens. Leur curiosité est tempérée d’un grand respect. Il y a peu de monde autour du véhicule et personne ne nous oppresse. Un opportuniste tente d’encaisser 2 dollars de l’heure pour le parking, tandis qu’un policier nous demande en riant si l’on n’a pas un petit cadeau pour lui. Devant nos mines souriantes et nos regards fermes, tous deux renonceront sans insister. La galerie de Casita se transforme même en terrasse, le temps d’une soirée passée en compagnie d’un couple français et d’un voyageur suisse accompagné d’un chilien. Nous refaisons le monde en leur compagnie, partageons nos impressions sur ce pays et échangeons nos coordonnées. Nous voilà munis d’une bonne adresse à Santiago du Chili, chez Alfredo. C’est certain, nous le contacterons dès que nous serons là-bas.
Reprise de la route : un nouveau défi
Conduire en Inde est un sport aussi fou que celui de se lancer d’une falaise avec un parachute. Nous avons donc fait le nécessaire pour trouver une carte pour notre GPS (ce qui nous rassure) et quitter la ville au petit matin, avant les embouteillages. C’est donc tout en douceur, au son de la voix du GPS que nous sommes sortis de Mumbai avec le lever du soleil. En fait, en termes de conduite, l’attitude des Indiens est de faire leur chemin, en annonçant à grands coups de klaxons leur intention. Tout autour, les autres véhicules s’adaptent et font leur chemin de la même manière… L’état des routes rappelle celles d’Afrique, couvertes de nid de poules. En revanche, les animaux sont relativement peu nombreux dans cette région et seules quelques vaches partagent la route avec les camions et autres rickshaws.
 
Quelques kilomètres après la sortie de la ville, une vingtaine d’hommes alignés et accroupis le long de la chaussée ne s’étonnent guère de notre passage. Nous essayons d’en faire autant sur leurs fesses à l’air.
 
Après 200 kilomètres de route, Véro trouve une station munie d’une pancarte GPL. On vérifie. C’est oui ! Nous pouvons remplir notre réservoir de gas. Nous voilà avec 30 litres de GPL, de quoi tenir 3 à 5 mois. C’est parfait ! Nous trouvons de l’eau sans peine pour remplir nos réserves. Les bivouacs sont simples. Nous nous arrêtons devant des hôtels-restaurants, prenons notre repas à l’intérieur et dormons sur le parking.
 
La route est très belle et nous conduit à travers des forêts verdoyantes, des plaines couleur gazon anglais et des rizières. Nous longeons et traversons de nombreuses rivières, au bord desquelles il fait bon s’arrêter et s’imprégner de la tranquillité et de l’indolence Indienne. Les paysages sont splendides et la douce chaleur humide qui les enveloppe apporte détente et bien-être immédiat.
 
Réflexions familiales : les maux de la faim
La mendicité nous interpelle. En particulier, celle des enfants, qui visiblement ont faim et dorment dehors. Quelle attitude avoir ? Que faire ? Comment réagir face à cet enfant, qui non content de la portion de riz que nous lui avons donnée a réclamé du lait pour son frère, qu’il tenait dans ses bras. Lait que nous n’avions pas, évidemment. La première réponse qui nous vient à l’esprit est celle de l’humilité. Il nous faudra oublier notre besoin de reconnaissance et nos attentes de merci. Ici, on donne pour donner. Ce qu’on peut donner. Ca ne sera jamais assez. Mais ce sera déjà quelque chose. Ne pas oublier qu’on ne donne pas pour se faire plaisir, encore moins pour redorer son image de soi ou réduire sa culpabilité face à la misère d’autrui. On ne donne pas par pitié non plus. Les mendiants n’en veulent pas. Alors quand donner ? A qui donner ? Quoi donner ? Nous faisons notre chemin…
 
Les rencontres de la population : un régal
Parmi les mises en garde que nous avions reçues, il y avait la répétitive : « Oh là là, le monde, vous verrez. Vous ne serez jamais tranquilles, c’est épuisant. » Peut-être ne sommes-nous pas dans les régions ainsi décrites ? Peut-être sommes-nous vaccinés contre le sentiment d’intrusion ? Peut-être que nos expériences de la Jordanie, où chaque minute écoulée connaissait sa dizaine de visiteurs, de la Syrie, où les enfants nous importunaient en frappant aux fenêtres, de l’Egypte, où les gens tentaient par tous les moyens de regarder à l’intérieur ou d’entrer, sans ne rien demander, ou enfin de l’Ethiopie, où chaque arrêt provoquait un attroupement de dizaines de personnes qui s’agglutinaient devant la porte comme des abeilles autour de leur reine, nous permettent-elles de vivre différemment la présence de monde autour de notre véhicule. Peut-être. Mais, il nous semble que c’est l’attitude des gens qui est différente ici.
 
Les gens nous approchent paisiblement. Ils demandent parfois à jeter un oeil à l’intérieur. Il leur arrive de demander une visite plus approfondie. Mais, jamais ils ne s’installent ni ne s’incrustent. Jamais leurs questions ne sont gênantes ou déplacées. Jamais leur présence ne nous importune. Parce qu’ils sont aimables, souriants, polis et attentifs à ne pas déranger. Quelqu’un nous avait dit qu’ils n’avaient pas le sens de l’intimité. Jusqu’ici, nous ne pouvons pas le confirmer. Ce n’est pas parce qu’ils utilisent parfois la rue en guise de toilettes (rappelons juste que dans ces endroits, il n’y a pas de toilettes tout simplement !) qu’ils sont sans gêne.
Cela a d’ailleurs fait dire à Véro avec beaucoup de tendresse et autant d’humour : « Finalement, ils bouffent avec les doigts, ils crachent à longueur de journée et ils caquent partout, mais ils ont une certaine bienséance qui est vachement agréable ! » C’est vrai…
 
Clin d’oeil.
Nous retrouvons en Inde quelque chose que nous n’avions plus vu depuis notre départ : des couples amoureux, se promenant main dans la main, venant admirer un coucher de soleil ou profiter d’instants de tendresse au bord de l’océan. En ville, comme à Goa, jeunes et moins jeunes se laissent porter par leurs sentiments et la légèreté de l’amour. Ces scènes nous étaient devenues étrangères. En terre musulmane, les femmes sont absentes à l’extérieur. En terre africaine, nous avons vu des groupes d’hommes et des groupes de femmes, mais pas de couples. C’est drôle de constater que cela ne nous avait pas frappé avant de retrouver ici câlins et regards complices entre hommes et femmes. C’est alors que nous avons réalisé combien tout cela avait été inexistant cette dernière année autour de nous…
 
Arambole : première escale dans l’état de Goa
Nous venons d’arriver dans l’état de Goa où nous bivouaquons sur de magnifiques plages bordées de cocotiers. La mer est chaude, tout en restant rafraîchissante. Nous sommes en face de Tiwi Beach au Kenya, de l’autre côté de l’océan. Les paysages se ressemblent un peu ; ici par contre, le coucher de soleil est sur l’océan.
Les enfants ont très bien repris l’école, avec une cour de récréation paradisiaque. Ils jouent des heures dans les vagues et adorent Goa. « Les rues sont jolies et il y a plein d’habits très sympas » a dit Zoé. Il souffle ici un vent de liberté absolue. Chacun fait ce qui lui plaît, comme il l’entend. Du coup, les tenues vestimentaires sont aussi libres que les gens. On trouve quelques hippies de la grande époque et des vacanciers de longue durée.
 
Les rencontres sont simples et les questions aussi. Notre installation sur la plage est parfaitement normale. Notre voyage aussi.
A titre d’exemple, nous avons assisté un matin à la pêche collective. Une cinquantaine d’hommes et de femmes oeuvraient à quelques mètres de Casita. Pendant que les hommes ramaient et rabattaient leurs filets, les femmes sont restées assises à les regarder travailler, tournant le dos à notre demeure. Un homme est venu à notre rencontre : « vous n’auriez pas un sachet plastique pour que je puisse mettre mon poisson ? » Nous avons le souvenir de scènes similaires ailleurs, où la foule ainsi réunie, se préoccupait bien davantage de notre petite vie que de son quotidien.
 
A suivre
Même si nous pensons déjà un peu à la Chine et aux démarches à faire, en nous réjouissant d’être peut-être accompagné de deux familles dans ce périple (surprise !), nous comptons bien prendre le temps et profiter de l’hiver au chaud et au soleil.
 
1ère Partie. Arrivée à Mumbai.
Mumbai (ex Bombay) 18 millions d’habitants, la plus grande, la plus dense et la plus grouillante des villes indiennes… Pourtant… La pollution est peu perceptible et peu dérangeante en fait. De nombreuses voitures roulent au gaz, dont les 80'000 taxis de la ville. Il y a beaucoup de verdure, d’arbres, de parcs. La présence de la mer de chaque côté de la ville lui offre un dégagement et de l’oxygène. L’ambiance qui règne dans la ville nous rappelle celle des villes africaines : bruyante, animée, variée, brassée. Ici tout se mélange : richesse et extrême pauvreté en particulier. Nous pensions avoir un choc en arrivant en Inde. On nous avait averti « ça n’a rien à voir avec rien de ce que vous connaissez », « C’est choquant » « c’est sale et ça pue »… Jusqu’ici, ça ne nous frappe pas tant que ça. C’est vrai, il y a les klaxons incessants. C’est vrai que notre hôtel n’a pas le même standing qu’à Dubai et que la salle de bain n’est pas dans la chambre. Mais la chambre n’est pas au même prix non plus ! C’est vrai, les mendiants sont souvent amputés d’un ou plusieurs membres. C’est vrai des enfants dorment à même la rue, là où quelques rats passent souvent. Mais pourtant, ce qui se dégage de cette ville, c’est l’ouverture, la vie, le mélange. Les mendiants réclament à manger plutôt que de l’argent.
 
La circulation est dense et infernale, mais par rapport au Caire, c’est largement supportable. Surtout, les gens sont aimables et serviables. Ils nous renseignent volontiers, avec le sourire et sans ne rien demander en retour. Les gens sont honnêtes et les négociations des prix se font dans la douceur et le respect mutuel. La nourriture est délicieuse, épicée sans excès à notre goût. Végétarienne et saine, elle réserve de belles surprises et découvertes sous des noms bien mystérieux au premier abord. On se sent bien dans cette ville. On y sort le soir, pour aller se restaurer ou faire du shopping. Aucun sentiment de malaise, encore moins d’insécurité. Nous nous sentons libres de nos mouvements, faits et gestes. Nous profitons donc de notre séjour à Mumbai pour y visiter ce qui s’y visite et pour faire du shopping. Pour la première fois depuis notre départ, nous nous lâchons et ça fait du bien. Nous avons refait la garde-robe de toute la famille, en profitant des prix bien sûr, mais surtout de la beauté et du confort des tissus et vêtements fabriqués ici.
 
Nous avons visité la maison dans laquelle Ghandi a vécu ici. Transformée en petit musée, on y trouve des photos retraçant la vie de l’homme et de sa lutte non violente pour la libération de tout un peuple. Emouvant. Nous avons visité un temple, sans ne rien comprendre pour l’instant aux cultes qui s’y pratiquent, mais en appréciant les chants et le son des cloches. Nous avons visité le quartier des laveurs. Depuis 136 ans, les cuves de ce quartier accueillent chaque jour tous les vêtements de la ville. Ils sont étiquetés, lavés, rincés et séchés, avant d’être pliés et emballés dans un papier journal, avant d’être ré acheminés vers leur propriétaire. Au retour, c’est propre et comme repassé ! Impressionnant.
 
Nous levons souvent les yeux sur des bâtiments magnifiques, de style britannique de la fin du XIX et début du XXème Siècle. Ils sont beaux et racontent l’histoire. Nous retrouvons enfin un pays avec des racines, une histoire, une culture. Nous ne savions pas avant d’entreprendre ce voyage, combien ce serait important pour nous en fait, d’être en contact avec ces éléments. Enfin, dans le Victoria Garden, nous avons apprécié le calme du lieu qui laisse au loin le brouhaha de la circulation et dans lequel un zoo à l’abandon permet d’apercevoir encore quelques éléphants d’Asie et autres oiseaux principalement. Inde : questions ouvertes.
 
Nous ne sommes qu’aux prémices de nos découvertes de ce pays et sous-continent et plusieurs aspects restent occultes à nos yeux. Le premier est le dodelinement de la tête des indiens. Tantôt ça semble vouloir dire « oui », tantôt « peut-être » et parfois « non ». Nous pensons souvent à Gilles qui nous avait décrit ce mouvement avant de quitter Abu Dhabi !
 
La religion et les cultes sont absolument impénétrables pour l’instant. Nous nous réjouissons de retrouver Casita et notre bouquin sur le sujet pour tenter de comprendre un peu mieux leurs croyances et leur culture. Nous avons réalisé que les cultures de chaque peuple sont profondément marquées par les croyances religieuses et que celles-ci sont souvent une clé de compréhension de la vie locale. La place de la femme dans la société indienne est une question qui ne nous avait pas effleuré avant de lire quelques lignes effrayantes dans nos guides de voyage. Nous aimerions creuser le sujet. Et puis, il y a les questions qui nous concernent. Comment vivrons-nous ce pays une fois installés dans Casita ? Comment évoluera la densité de population une fois sorti de la ville et quelles seront les réactions des gens sur notre passage avec Casita ? Comment roulerons-nous dans cette circulation chaotique ? Nous sentirons-nous aussi bien dans les campagnes et terres reculées que dans cette ville qui nous offre un anonymat confortable ?
Septembre 2009. Inde, Mumbai
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